La raison de vivre [Tragique]

Ca fait une heure que je suis là. Une heure !... Affalé sur ce canapé, le poste de télé allumé. Je ne cherche même pas à regarder ce qu’il y a : la télévision me sert de bruit de fond. On dirait que là, ya cette connerie de téléréalité, encore une pompe à fric pour nous décerveler.


Aujourd’hui, une belle journée, du soleil, du beau temps… Et le boulot, encore le boulot, toujours le boulot. Il y avait un petit dealer, un jeune, que j’avais pris en filature. Je l’ai suivi durant plus de quatre heures, et c’est long quatre heures. Je pensais pouvoir en apprendre plus sur son fournisseur, mais rien, il a fait ses tournées toute la journée. Vers 16h15, j’ai décidé de l’appréhender… Il m’a vu venir de loin, il a sorti une arme à feu, j’ai dégainé, j’ai tiré. En examinant son corps, j’ai vu un gosse de 16 ans avec un 9mm semi-automatique sur lui… Il avait 16 ans ! J’ai déjà tué des gens, ouais, mais pas des enfants, pas des gamins… Il aurait tout à fait pu être mon neveu de 17 ans, c’était pareil, j’aurai fait la même chose.

Bien sûr, au bureau, c’était « T’en fais pas t’étais en légitime défense », ou alors « t’avais pas le choix »… Peut être, mais lui il avait 16 ans… Lui il avait le choix de vivre, et je lui en ai privé… Si encore tu étais là, toi, tu pourrais tenter de me remonter le moral, mais voilà, tu n’es pas là, tu n’es plus là…


La vie c’est con, mais que dire de la mort… Ce 20 Février 2006… Tu rentrais du boulot, vers 17h30, comme d’habitude. Tu roulais sur la quatre voies, jamais au dessus de 100km/h. Mais voilà, il y avait cette voiture rouge, cet envoyé funeste. Elle roulait à contre sens, elle allait vite, tu n’as pas pu l’éviter, et la suite ? On la connaît… Ce mec avait le droit de se tuer, mais pas de prendre une autre vie, ça non, mais il aura fallu que ça tombe sur toi. Dire que tu étais enceinte, « en cloque » comme dirait Renaud. La vie est bien trop injuste, et c’est à la Mort de nous le rappeler. Si tu me voyais aujourd’hui… Les cheveux en bataille, l’œil semblable à celui d’un poisson pas frais, pas vraiment propre, mal sapé, la clope à la main. Oui car je fume à présent. Je dois tourner à 40 par jours, ça fait beaucoup aussi 40, mais bon, ça où autre chose à présent, qu’importe… Et que dire de l’appart, enfin si on peut encore appeler « ça » un appart… Une piaule à la rigueur, mais plus un taudis en réalité. Ca doit faire deux mois que je n’ai pas fait le ménage, je devrais peut-être m’y mettre, peut-être… Ce 20 Février 2006, tout s’est arrêté… 20 Février 2006… 20 Février 2006… 20 Février 2006 … 20 … 02 … 06 … Ca fait exactement 478 jours, déjà, et pourtant, c’est long, très long, trop long… 478 jours, et sans doute 477 fois où je me suis retrouvé là, sur le canapé, devant ma télé allumée.


Il y a la photo sur la table, celle du jour de nos fiançailles. Il faisait beau aussi ce jour là, c’était un Vendredi. Tu étais radieuse sur cette photo, et moi, je vivais encore à l’époque, contrairement à aujourd’hui. C’était dans le parc, tu avais 23 ans, moi 25, c’était si beau, on était si bien… A côté de cette photo, ma bouteille de Whisky, ma drogue comme certains le disent. Je crois que je suis bien plus dépendant à mon paquet de Gauloises qu’à ma bouteille de Balantines… En plus elle doit être vide à présent… A côté d’elle, un cendrier, et oui, clopes obligent… Et enfin, mon Beretta, posé là, avec ma plaque. Comme je l’ai déjà dit, c’est la 477ème fois où je me retrouve comme ça. Pourquoi donc ? Bah… Aujourd’hui, c’était la 477ème fois où j’ai cherché pourquoi continuer, pourquoi persister… Tous les jours depuis que tu es morte, je cherche une réponse. Jusque là, j’ai trouvé 476 réponses, pas mal hein ? Pas mal ouais… 476 réponses, 476 raisons de continuer, de se battre, de vivre… Mais voilà, la 477ème fois, je n’ai rien trouvé, du moins je ne trouve rien. J’ai beau chercher, mais mes pensées sont fixées sur ce gosse, de 16 ans à peine. Comment trouver une raison de vivre quand on tue, quant on assassine un jeune de 16 ans ?! Si seulement je le savais, mais je ne le sais pas… Peut-être aussi que j’en ai simplement marre de cette mascarade, de cette vie, de moi…


Je n’avais jamais vu que mon Beretta était si sombre, ni même remarqué qu’il était si froid, glacial. C’est une belle arme, bien équilibrée, efficace qui plus est. Ma bouteille de Balantine est vide, ma clope est finie, mon paquet avec… Le cendrier est plein de cendres, et le flingue, plein de balles… Aujourd’hui, je ne sais pas pourquoi je vis, je ne sais plus pourquoi je vais vivre, je ne sais pas non plus pour qui. Si je n’arrive même pas à protéger des gosses, si je les tue, pourquoi continuer ? Pour en tuer d’autres ? Alors autant en finir de suite…


A ta mort, je me suis juré que chaque jour, je trouverai une raison de vivre, pour me battre. Je crois que je vais avoir du mal à tenir ma promesse… Le plus dur, ce n’est pas de porter l’arme à sa tête, mais d’y presser la détente. Je ne l’avais jamais sentie si … difficile… résistante… Il n’y a que ça à faire, appuyer, pourtant on dirait que je tremble, je pensais pas que c’était si dur de le faire… Dire que le proprio de l’appart ne va pas être très content, le sang c’est tenace comme tâche… Paraît qu’il faut fermer les yeux si on a peur, mais je veux voir la Mort, MA mort en face…



Au revoir programme télé débile,
au revoir clopes,
au revoir whisky,
au revoir taudis,
au revoir boulot,

au revoir vie injuste…

Et bien tout d'abord...

Bravo !

Du très bon travail.

Un texte qui est captivant, tu joues avec le lecteur et tu nous rends le personnage attachant.

Pour ce qui est de la qualité littéraire du texte, et bien cela me fait penser à "L'Optimiste": assez inégal ! La première partie est...sympathique. La seconde est géniale.

Du ressenti, un style sympathique, bien qu'il ne se rattache qu'au personnage et que l'on ait pu voir le narrateur lui-même en action, première personne oblige.
Mais quelques petites choses à corriger donc, y compris quelques lourdeurs, non pas sytlistiques, mais au niveau de l'expression de ton personnage ; je ne parle pas des lourdeurs volontaires bien entendu ^^

Bravo donc pour ce texte qui s'avère être excellent!

Alors le petit vagabond...

On ne dit pas je lui en ai privé, mais je l'en ai privé. Ouhlala que tu as été vilain...

Ensuite... Ya encore des fautes

Et sinon... C'est tout bien comme texte ! C'est vraiment entraînant, on est pris dans l'action et voili voilou...

(oui je sais je viens après la bataille, et alors ?)