Une Arrivée Anodine

Sur les Chemins de l’Académie, ce qui ressemblait à un jeune enfant approchait, un sac dans son dos et une épée à sa taille. Il avançait d’un pas calme et discret. Ses sombres yeux gardaient secrètement trois iris bleus océans, lui donnant un air un peu sauvage et énigmatique. A ses poignets étaient dessiné le symbole de ses origines, un dragon entourant une croix avec son nom écrit en langue ancienne : Hezeriel Shinobi. Il portait pour ce voyage des habits légers et amples dont les bords étaient finement ciselés et encadrés d’un trait d’or persistant. Sur son front dort une petite étoile cachée par une frange noire comme l’ébène que le vent trouble gaiment en s’y glissant parfois. Il représentait pour les troubadours cette « douceur d’être et de n’être pas qui passe indolemment dans le monde sans rien éveiller, pas même le sommeil délicat des poussières voyageuses".

Hezeriel était un orphelin qui n’a jamais connu ni père ni mère. Dans son cœur, il n’y a qu’un amour, celui qu’il réserve pour les Arts et les Lettres. Le reste a si peu d’importance qu’il préfère l’oublier. C’est un enfant très solitaire, passionné, et parfois agressif. Il porte dans son âme les malédictions de sa naissance et dans son allure cette sombre lutte intérieure s’exprime dans une mélancolie, une tristesse éternelle, ou parfois
passe fugitivement un sourire comme une pensée éphémère. S’il vous parle d’amour,ce n’est pas celui qui vibre dans son cœur mais bien souvent, c’est celui qui se transcende dans ses mots et qui devient une fièvre lancinante, comme un rêve qui se mêlerait à la réalité.

Atteignant les grandes portes de l’Académie, il sonna à l’entrée.
Il dut attendre un peu mais très vite on l’ouvrit. Il se présenta et annonça qu’il désirait vivement rentrer dans l’Académie. Ses mots étaient calmes et posés. On le pria de suivre et il fut introduit dans une petite salle avec un bureau. Un homme d’âge moyen le regardait entrer, de ses yeux gris-verts.

Bienvenu à l’Académie, Hezeriel. Assoyez-vous. On me dit que vous voudriez rentrer dans l’Académie… . D’où venez-vous ?

De loin, au-delà de la voix Lacté, dans le Septentrion des six cent soixante six étoiles.

Effectivement… je n’en ai jamais entendu parler… .

La discussion continuait, l’enfant s’ennuyait un peu mais il répondait avec précision et ne manquait jamais de précisions facultatives. Quand
les questions se finirent, on lui proposa d’aller déposer ses affaires dans le
dortoir avant d’être présenté de manière plus officielle.

Il suivit l’homme tout en laissant son regard fuir comme une voile hasardeuse sur les murs, les tableaux disposés ça et là et tous les ornements riches qui se trouvaient sur son chemin. On lui indiqua où poser ses affaires et puis on l’entraîna à nouveau un peu partout pour le faire visiter. Il croisa quelques visages curieux qui le dévisageaient et doutaient bien qu’il venait d’arriver. Il fuya ses esprits et se contentait de rêver tout en écoutant ce que disait son guide.

Ils s’arrêtèrent enfin devant un balcon qui surplombait le hall. L’homme se retourna et lui dit :

Voilà votre nouvelle Maison, Hezeriel. J’espère qu’elle vous conviendra et que vous l’aimerez comme nous l’aimons !!

Sûrement…

Il avait murmuré les mots avec une note triste. S’appuyant sur la rambarde du balcon, il regarda les hautes colonnes filer vers les Arches qui soutenaient la voute du hall d'Entrée. Quelque chose lui manquait. Il n’avait pas écrit depuis longtemps… .

Invité

L'Académie était calme en cette fin de journée, le Grand Hall reposait dans une morne quiétude, bientôt troublée par des bruits de pas qui martelaient le sol avec nonchalance. Elvia regagnait ses appartements, les bras chargés de dossiers dont les feuilles manquaient de s'échapper à chacun de ses mouvements. Alors qu'elle atteignait le centre de la pièce, la jeune femme sentant comme un présence, leva machinalement les yeux en l'air. Sur l'un des balcons qui surplombait le Hall, un enfant l'observait.

Bonjour, cria-telle, vous venez d'arriver je présume? Ne bougez pas, je vous rejoins!

Elvia posa ses dossiers à même le sol et soulevant les plis de sa toge, monta les escaliers sans se presser. Quand elle fût arrivée à hauteur du jeune homme, elle lui sourit gentiment. L'Académie accueillait en son sein toutes sortes d'individus et l'âge ne lui importait guère tant l'amour de la plume primait sur le reste.

Je vous souhaite la bienvenue en Aëringor! J'espère que vous trouverez ici tout ce dont vous aurez besoin..si des questions vous venaient à l'esprit quand au fonctionnement de l'Académie, les membres et moi-meme nous ferons un plaisir de vous guider.

L'enfant regarda avec ses yeux sombres la jeune dame qui venait d'arriver. C'est étrange... Ses mots sont tendres et sa voix si douce.. Quelques vieux souvenirs éclairement fugitivement son âme. Il ne connaissait personne ici. Mais il sentait une douce chaleur l'envelloper. Ce devait être une personne importante avec tous ses dossiers, et au vu de ses habits...une doyenne tout simplement.

Il fit claquer ses bottes et s'inclina majestueusement. Puis, nonchalent et suivant sa tristesse habituelle, il la regarda comme un enfant regarde l'inconnu: avec une vague curiosité mêlé de timidité.

J'essairai, Madame, de ne point entacher par mes mots la réputation de votre Académie... . J'essairai...

Il essaira, il chutera souvent, mais il essaira. Passant sa main sur la paume de son Epée, il s'inclina une nouvelle fois et retourna à sa contemplation.

Elvia rentra dans la taverne avec un jeune homme. Bien que petit et assez frêle, on pouvait lire dans ses yeux la sagesse de l' expérience, une expérience peut-être marquante, et une forte mélancolie ou je ne sais trop quoi...

-Bonjour à tous, dit-elle quand elle fut dans a salle à la table d' argent. Je souhaiterais vous présenter un nouvel adhérent, un nouveau frère de la lecture et adepte de la plume. Voici Prince-Seigneur.

Hum... vous voyez le bruit que font le tonnerre et la pluie sur un bateau lorsque les marins tentent d' hurler plus que le vent, que l' eau tente de recouvrir ce frêle esquif qui a osé le défier dans toute sa puissance, que l' orage mugit comme un mourant se noignant dans la douleur et la tristesse... Bon, vous mettez ça dans une salle fermée, avec une cinquantaine de chaise grincantes et crissantes, quelques paumés qui crient bonjour au nouveau venu, plusieurs qui lèvent leurs verres en les faisant claquer, plusieurs pas qui marchent en cadence, et un nain de ma connaissance qui en profite pour lacher un vent dans la mélée... Voilà à peu-près ce que l' on obtient (bien que l' action du nain soit pratiquement passé inaperçue).
Je me levais à mon tour, suivant mes camarades, pour allez souhaiter la bienvenue au jeune homme.

Hezeriel s'était assis lors du grand remue-ménage en son honneur. Il cherchait dans toute cette foule hurlante quelque chose, quelq'un qui lui ressemblait peut être: des yeux marins, des yeux envolés qui glisseraient sur la joie humaine comme glisse les navires sur les rivières endormies. Il sortit un pendentif de sa poche qu'il serra très fort, puis il le remit à son endroit. Personne ne put au juste dans cette effervescence voir à quoi il ressemblait.

L'enfant salua les personnes qui le saluèrent, serra les mains qui se tendaient. Toute cette ronde folle lui donnait parfois envie de fuir. Mais il resta, et un fragile sourire se déposa sur ses lèvres.

Peut être était ici l'ailleurs qui offrait des rayons dans les yeux... Peut être...

Il prit une feuille et un crayon qui traîna et commença à laisser quelques mots

Quelque part, quelq'un m'attend
Ses fines lèvres d'or chanteront
Dans les vents légers et dormants
Mes rêves, mes rêves et mon nom...

Quelque chose chatouilla la joue d'Hezeriel, par pur réflexe il se retourna tout en portant sa main inutilisée vers l'origine de cette gène occasionnée. Il y découvrit un jeune homme penché sur ce qu'il avait écrit, un sourire timide et doux sur son visage, ses longs cheveux chatains ballotait sous la brise pringtanière. C'était sans doute une de ses mèches qui l'avait chatouillé ainsi. Bizarre qu'il ne l'ait pas entendu ni ressenti tout de même, le vent non plus ne lui avait annoncé sa venue.

- Jolis vers, est-ce là le début d'une oeuvre aux attraits poétiques envotante, ou juste queqlues paroles écritent dans un but différent ?

Hezeriel posa sa main sur la feuille tachée par ses rêves.

Ce ne sont que des vers... qui en supposaient d'autres... ou n'en supposaient pas.... .

Il tourna ses yeux vers ceux d'Astriels. L'étoile à son front brillait dans les pupilles d'Astriel. Un éclair passa dans ses yeux. Il l'invita à s'assoir et écrivit devant elle quelques mots de plus tandis que l'on festoyait toujours tout autour d'eux.

Vous n'avez qu'à continuez s'ils ne vous déplaisent pas trop

Il se leva et se glissant entre les gens disparut dans la foule. Il trouva le var après quelques errances et commanda une grenadine. Dans l'ombre il examinait les gens. Peut être, peut être qu'il trouvera ici ce peu de joie qu'il faut pour rester longtemps, peut être qu'il aura enfin un ciel qui brille plus que sur ses terres, et peut être que son Art s'élévera et saura enfin lui rendre ses rêves et ses espoirs.

Il mit la main sur le pommeau de son épée, passant sur toutes les fins ornements, comme un jeu inconscient. Puis, ayant fini son verre, il s'approchait de la sortie. Il entendait une pluie violente battre dehors.

Il avait toujours aimé la pluie. C'était comme des larmes que le monde lui cédait et qu'il recueillait dans ses main pour les voir s'effacer discrètement. Ou peut être étaient ses larmes que le monde avait gardé et qui lui rendait. Il entre-ouvrit la porte et se glissa au dehors. Enfin il s'adossa contre le mur de la taverne, et regarda le ciel chanter ses peines.
Un doux vent passait et balayait ses cheveux noirs.

Malgré la pluie qui ne cessait au-dehors,j'avais entendu le mot "poésie."A lui seul,il réveilla en moi l'instinct de l'écriture,l'envie de rencontrer un nouveau confrère..En m'aprrochant de la table autour de laquelle se trouvait plusieurs gens, et notamment Astriel, je vis ces quelques mots..
"A ce que je vois,notre nouvel ami est un poète..Mais où est-il passé?"
Quelqu'un me désigna la porte d'entrée.Je le remerciai et sortis, puis j'aperçus dans cette pluie tombante une ombre..Un loup?En ces lieux et cette saison?Après tout,il y avait bien un homme chat et un tigre au sein de l'Académie..Je m'approchai donc.
"Bievenue au sein de l'Académie..A ce que je vois,toi aussi, tu aimes la noirceur..Nous sommes deux poètes mélancoliques,n'est-ce-pas?"

Hezeriel brisa tout de suite son illusion en refermant sa main. Le loup disparut sans laisser de trace. Il examina le nouveau venu un moment, comme pour essayer garder au fond de soi une image précise de son allure.

La Mélancolie... Peut être...

Il redirigea ses yeux vers la fenêtre et murmura

L'on n'aime pas la noirceur. Et les mélancoliques souffrent de cette ombre qui ronge leur âme sans cesse. Ils voudraient la lumière, qu'il n'auront jamais. Ils sont... des Espérants qu'aucune lumière ne veut approcher. Non..ils n'aiment pas la noirceur... mais il semble qu'ils ne savent vivre qu'en elle... et qu'ils ne sont qu'elle...

Il se tourna vers Black Poet, son sourire s'était effacé.

Merci à vous de m'annoncer la bienvenue. Aimez vous courir sous la pluie?

"Votre discours m'impressionne,je vous l'avoue.Cependant,je ne suis pas tout à fait de votre avis; selon vous, la noirceur est bannie de ce monde..mais selon moi,elle est partie intégrante de notre vie,n'est-il pas?Lorsque vous souffrez d'un évenement passé, qui peut encore avoir des incidences sur le présent,n'êtes-vous pas mélancolique?C'est ainsi que je suis et c'est pour cela que je vis..IL en a voulu ainsi.J'ai choisi mon destin.Elle a décidé de le briser..."
Tout en prononçant ces paroles,j'admirais la pluie..Et je noyai avec elle ces larmes,témoins d'un douloureux passé qui, par quelque accident,avait fait de moi un poète noir.
"C'est ainsi que je vis..J'ai vécu pour elle.Mais aujourd'hui,j'ai changé..Même si je garde en moi cet instinct de survie.Sur ce,repris-je, puisque vous aimez vous aussi la pluie,courons.Qui arrivera le premier aux grandes portes de l'Académie?"
Sur ces mots,je m'élancai.

Comme je l'entend, la Mélancolie est une maladie... non quelques instants dans une vie...

Ces mots avaient résonné dans la tête d'Hezeriel sans qu'il les ait prononcé. Démarrant sa course trois secondes après Black Poet, il le suivait de près.

La Pluie avait de beau et de tendre cette douceur qui s'exprime comme une caresse, chaque goutte effleure le visage, s'emmêle dans les cheveux, et glisse au coin des lèvres commes des larmes de rosée.

Les habits dorés de l’enfant se mouillèrent vite, et très rapidement il était trempé. Mais il continuait sa course sans perdre cette joie infinie qui le pénétrait au fur et à mesure qu’il se sentait comme fondre dans le paysage sombre. Il ne savait trop où ils allaient et où se trouvaient les portes de l’Académie et suivait donc Black Poet. Un sourire dormait dans ses yeux aux trois iris bleus. Il n’évitait ni les flaques d’eaux qui étaient apparues sur le sol ni les fougèrent qui parsemaient parfois le chemin .

Quand enfin ils arrivèrent tous deux étant haletants, haletants mais contents. Hezeriel se sentait comme heureux d’être ici et d’avoir été accepté. S’asseyant sur les marches, il regardait la lumière envahir à nouveau les Cieux. La pluie avait été de courte durée. Il regarda à la dérobée Black Poet un moment puis se reconcentra sur le ciel.

Bientôt il faudrait qu’il commence les cours, mais il voulait profiter de ce moment de libre qu’on lui accorder. En profiter un peu, comme il l’entendait. Ses cheveux noir descendaient jusqu’à ses épaules en cascades et volaient parfois sous quelques bourrasques de vent. Des gouttes de pluie ruissellaient encore un peu sur ses joues, comme des larmes d’éther.

Peut être qu’au fond la mélancolie est… une maladie que l’on a à la naissance. Elle vous prend le cœur, et ne vous le rend jamais. Elle se glisse dans votre sang et devient votre essence. Et dans ce mal infini l’on trouve l’unique force qui nous fait tenir encore debout… Peut être…

"Tu cours vite",repris-je, essouflé.
La pluie avait trempé mes vêtements,et je regardai ce jeune garçon, trempé lui aussi, qui s'ébrouait..Il avait tout d'un loup.Il était un loup.
"Vois-tu, je ne ressens pas la mélancolie comme une maladie..Mais je suis d'accord que la plupart des personnes atteintes la possèdent dès la naissance..En tout cas,je pense être guéri...Pour combien de temps,je ne le sais,mais je suis guéri."
Un sourire apparut sur mes lèvres.
"Encore une fois,bienvenue parmi nous."
Et je repartis, mouillé de la tête aux pieds, mais heureux.Je venais de me faire un ami..Qui était bien jeune,mais un ami quand même.
Enfin le moment que j'attendais..Le mage de l'écriture me possède.L'inspiration est en moi..Elle est revenue.

Hezeriel regarda un moment partir black Poet. Le soleil inondait totalement le ciel désormais. Il pensa un moment à ses affaires restés dans le hall avant qu'il soit emporté dans la taverne. Il n'avait eu le temps de tout saisir mais il avait trouvé l'accueil chaleureux. Il s'assit sur les marches blanches de l'Académie. Il faudrait qu'il porte maintenant les habits de rigueur. Tout cela allait lui prendre un peu de temps. Il s'en doutait. Il resta pensif un moment. Puis rentrant dans le grand Hall d'Entrée il se dirigea pour aller reprendre ses affaires qui étaient restées au balcon.

Peut être...peut être que l'on guérit la Mélancolie ici...

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