Cabale...ou justicier ? [Histoire vraie romançée]

Le buit sourd de la pièce posée sur le plateau résonna dans la grande crypte. Après un dernier coup d'oeil sur la situation, il relâcha sa dame. Il avait joué, tout était maintenant dans la tête de son adversaire. Il se laissa aller contre le dossier de son siège de pierre, ferma quelques instant les yeux, la tête en arrière. Le temps de se débarasser de ce trop-plein de concentration, de focalisation.
Quand il reporta son regard sur la grande table ronde et le petit damier qui y était posé, il constata une fois de plus à quel point une situation pouvait paraitre si large, pour peu que l'on prenne le temps de s'en rappeler. A quel point, tel un objectif de camera, l'esprit humain pouvait zoomer et dezoomer. Il avait presque oublié ce qui dépassait de ces huit cases et huit colonnes.

Savoir que l'on peut perdre, savoir que tout tiend à ce que l'adversaire voit ou non la faille. Guetter l'éclat dans les yeux, le geste, le rictus qui indiquait qu'il était sur la piste. Qui pouvait permettre de voir un minimum venir la fin de la partie.
Il releva un peu la tête pour scruter le visage de la jeune femme en face de lui, mais sans guère d'espoir. Le visage neutre, détendu, quelques boucles de ses longs cheveux dépassant de sa capuche. Le regard rivé sur le champ de bataille. Non, décidement, elle n'était pas du genre à donner une indication quelconque.
Il se contenta donc d'appuyer sa tête contre la paume de sa main et d'attendre, ainsi accoudé. Les flammes du chandelier illuminaient faiblement la pièce, donnant presque vie aux pièces de bois par leur jeu de couleur. Le reste n'avait guère besoin d'une lumière quelconque. A quoi bon mettre en valeur des murs nus et froids ?

Le cavalier. Elle avait saisi son cavalier. Mauvais signe. Il se redressa, tendu. Avec mesure et grâce, comme à son habitude, elle le déplaça, sans aucune hâte. Le détachement dans la victoire. Car elle avait trouvé. La pièce se posa sur la case tant redoutée avec un bruit mat. Prémonitoire.
Un rapide coup d'oeil au jeu. Puis ce sourire fragile et sincère, sourire d'amitié. Comme si personne n'avait perdu ce soir.

Echec et mat...

Il hocha la tête, ressentant lui aussi cette forme d'appaisement si particulière. Une belle partie, qui lui avait beaucoup appris. Il y a encore quelques temps, il se serait énervé, aurait pesté contre lui-même, maudit le sort qui lui avait fait trouver plus fort que lui. Mais il ne la connaissait pas. Insidieusement peut-être, elle lui avait fait voir les échecs comme ce qu'ils devaient être. Une satisfaction intellectuelle, un plaisir de réfléchir, de déployer sa toile. Une façon altruiste de partager.Le jeu pour le jeu. Une vision qui réduisait victoire ou défait à l'anecdote.

Un bruit de bottes et de flaques d'eau parvint à ses oreilles. Et bientôt, dans le petit boyau, apparurent les premières lueurs des flambeaux.

Tiens...on dirait qu'ils arrivent...

Effcectivement...un seul ne ferait pas autant de raffut...même Benzin...

Tandis que sa compagne de jeux se levait, il remit sa capuche d'un geste. La réunion allait bientôt pouvoir commençer.
Dix minutes après, il étaient tous les six, dans leurs longues capes vert fonçé, debout autour de la grande table de gré. Les torches, qui avaient été accrochées au mur tout le long de la salle, illuminaient bien plus convenablement la petite annexe de crypte, oubliée de tous et accessible par un souterrain humide et venteux. Ce n'était pas pour rien que les capes étaient épaisses.

Sortant de sous leurs habits livres et manuscrits, ils discutèrent longuement, parlant tour à tour ou tous en même temps, racontant ce qu'ils avaient vu et entendu. S'enflammant parfois, ponctuant de grand gestes leur envolées, tournant autour de la table. Faisant passer de main en main cartes et listes, dans un mouvement à la fois désorganisé et élégant.
Certains étaient petits, d'autre grands. Certains costauds, d'autres frêles. Mais tous soudés par cette même flamme dans les yeux, cette même conviction, cette volonté farouche. Ce regard implacable d'hommes de l'ombre, aussi.

Deux heures après, ils en avaient fini. Tout était prêt.

Bientôt, les prêtres de Sion seront reconnus dans la galaxie. Et feront trembler les plus puissants si il le faut. L'heure est bientôt venue de montrer à tous notre visage, frères.
Pour l'ordre, pour Sion !

Tous répétèrent cette phrase en coeur. L'air vibra une dernière fois au son de ce chant de guerre, de la guerre pour exister. Le fruit de durs labeurs.
Puis, tout sembla comme s'évanouir. Ceux qui étaient venus repartirent, reprenant leur torche, dont le point lumineux se perdit bientôt dans l'obscurité. En parfait hommes de l'ombre.

Encore une partie ? Ou tu t'inclines définitivement ?

Ma foi, j'accepte d'en rester là pour ce soir...

Tiens donc, tu as décidé de me surprendre ?

Arrête donc de me taquiner, c'est indecent à cette heure...il est temps que l'on parte, nous aussi. Tu viens ?

La jeune femme se saisit du chandelier.

Je te suis...

Non, c'est moi qui te suis, tu as la lumière...

Comme tu veux...

Le sourire au lèvres, ils quittèrent eux aussi la pièce par le tunnel d'en face, rendant à la voute de pierre son obscurité et son silence habituel.
Elle s'appellait Elvia. Il s'appellait A. Et tous entendraient bientôt parler d'eux.


[HRP]
Voilà, nouvelle histoire inspirée par les deux mamelles de ce forum, si je puis dire... merci à eux d'exister pour me donner toutes ces idées...
Comme l'a fait remarquer Elvia, je fais finir par devenir chroniqueur officiel...mais avec eux c'est toujours un plaisir.
J'ai leur ai dédié le texte de la création de l'académie, et je ne le ferai pas avec celui-là. Par peur que l'habitude ne tue le sens. Parce que je ne l'ai pas forcement fait pour eux à la base...même si peut-être plus que je ne le pense, réflexion faite. Aussi parce que je pense qu'ils savent déjà le bien que je pense d'eux.
Mais merci à vous deux d'exister...sans vous, je n'aurais jamais écrit ça.

PS pour notre cher Warlhoq : euh, ben quoi dire...Hier à 23:56...c'est une excuse, chef ? Je fais ce genre d'histoire en une petite demi-heure à partir d'une idée directrice ou d'un évenement réel...c'est pour ainsi dire des textes, disons instinctifs. Du coup il y a parfois des fautes ou erreurs de frappe.
A peu près résolu, là, je crois...à moins que j'en ai encore loupé
[/HRP]

[hrp] Petit texte sympa encore une fois
Contrairement a d'habitude, aurais tu fait un effort pour faire des fautes :p , peut être as tu posté à la hâte ? [/hrp]

[HRP/]J'aime beaucoup , comme d'habitude c'est fluide, et on accroche plutôt bien...Mais arrete de poster si tard, tu fais des fautes de frappes enormes des fois.Bon tu ne me battras pas la dessus , parce que je peux rendre un texte facilement ilisible...Mais bon c'est très bien " Maître" [/HRP]

<hrp> Bravo C'est vraiment super </hrp>